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Plan national de l'énergie et de l'efficacité énergétique : Maroc

Plan national du Maroc pour l'énergie et l'efficacité énergétique

Le 6 juin. 2023
Auteur : Rabab Hteit

Déterminé à réduire les coûts élevés des importations d’énergie et à poursuivre un développement vert, le Maroc a lancé en 2008 son plan national pour l’énergie et l’efficacité énergétique (PNEE), qui définit une série d’objectifs pour passer à une production d’énergie plus verte à partir de sources éoliennes, solaires et hydroélectriques. Le plan a permis de réduire les émissions de carbone et d’améliorer l’accès à l’électricité dans les zones rurales isolées.

En 2008, le Maroc était le plus grand importateur d’énergie en Afrique du Nord,1 en important la quasi-totalité de ses ressources énergétiques à base de combustibles fossiles, ce qui rend le pays vulnérable aux chocs sur le marché des combustibles fossiles. La dépendance à l’égard des combustibles fossiles a également exacerbé la vulnérabilité du Maroc aux effets du changement climatique, qui affecte de manière disproportionnée les personnes dont les moyens de subsistance dépendent de la terre et les personnes à faible revenu vivant dans des zones d’habitat informel. Le Maroc est très sensible au changement climatique, et en particulier aux sécheresses.

Le NEEAP vise à réduire l’empreinte carbone du Maroc et à abaisser le coût de la production d’énergie. Il visait à produire 8 % de l’énergie primaire (équivalant à 20 % de la consommation nationale d’électricité) à partir de sources renouvelables d’ici à 2012.2 L’objectif était de porter ce chiffre à 42 % d’ici à 2020 et à 52 % d’ici à 2030.3

Le plan prévoit une augmentation de la production d’énergie renouvelable répartie équitablement entre les sources éoliennes, solaires et hydroélectriques, tout en accordant la priorité à l’efficacité énergétique. Pour soutenir davantage le développement du secteur, les subventions à l’essence et au diesel ont été progressivement supprimées en 2014-2015, au cours d’une période où les prix du pétrole étaient bas, et le marché des énergies renouvelables a été ouvert à la concurrence étrangère et à l’investissement dans des projets menés par le gouvernement.4

En 2008, la capacité hydroélectrique du Maroc représentait déjà 24 % de la capacité installée. Le plan a donc donné la priorité au développement de l’énergie solaire et éolienne dans le cadre du Plan solaire marocain (2009) et du Plan éolien marocain (2010). Le Plan solaire marocain (NOOR) est l’un des plans d’énergie solaire les plus ambitieux au monde. Il vise à produire 2 000 mégawatts (MW) d’énergie solaire d’ici 2020 (3 000 MW d’ici 2025 et 4 000 MW d’ici 2030) grâce à des centrales solaires de grande envergure situées dans cinq endroits choisis en fonction de leur impact socio-économique potentiel, de la disponibilité des terres et des ressources. Ouarzazate est la première centrale solaire à être achevée dans le cadre de NOOR et est actuellement la plus grande centrale solaire au monde. On estime qu’il dessert un million de personnes.5

Pour atténuer les inégalités spatiales, des systèmes solaires domestiques « pay as you go » sont disponibles dans les zones rurales qui sont trop éloignées pour être efficacement connectées au réseau national, le gouvernement ayant subventionné les coûts d’installation et attiré des entités du secteur privé pour rivaliser en vue d’une électrification complète. Les clients paient un pourcentage des coûts du système installé (entre 13 et 85 % en fonction de la capacité) par le biais d’un paiement initial suivi de petits paiements mensuels.6

Le programme intégré d’énergie éolienne 2010 du Maroc visait à augmenter la production nationale d’énergie éolienne à un gigawatt (GW) d’ici 2024 et jusqu’à 4,2 GW d’ici 2030,7 et passer de 2 % de la capacité installée en 2008 à 14 % d’ici 2020 (qui a en fait atteint 13,37 % en 2021). Dans le cadre de ce plan, le Maroc accueille l’un des plus grands parcs éoliens d’Afrique : le parc éolien de Tarfaya a une capacité installée de 301 MW.

Mise en œuvre

La mise en œuvre du PNAEE est sous la responsabilité de l’Agence marocaine pour l’énergie solaire (MASEN), une entreprise publique-privée. Elle a été créée spécifiquement pour superviser la mise en œuvre de projets d’énergie renouvelable à grande échelle. Le Fonds Hassan II pour le développement économique et social, la Compagnie d’investissement énergétique et l’Office national de l’électricité (ONE) sont tous des parties prenantes de MASEN.8

Pour approuver un projet, MASEN exige qu’il démontre (1) le développement local, (2) l’intégration industrielle et (3) la coopération internationale (Nord-Sud ou Sud-Sud).9

MASEN fonctionne avec le soutien politique du gouvernement, les garanties de la Société d’Ingénierie Energétique (SIE) et des institutions financières internationales, avec l’assistance technique des bailleurs de fonds. En 2021, MASEN est devenue une entité accréditée auprès du Fonds vert pour le climat (GCF), ce qui permet au Royaume d’accéder à des fonds de financement climatique plus importants.10

Coût

L’Agence marocaine de développement des investissements indique que le gouvernement marocain a investi 34 milliards d’euros (37,5 milliards de dollars) dans le NEEAP, dont 78 % proviennent d’institutions mondiales de financement du climat telles que le GCF.

D’ici 2020, on estime que 9 milliards d’USD auront été investis dans l’énergie solaire au Maroc, et 3,1 milliards d’EUR (3,4 milliards d’USD) dans l’énergie éolienne. 3,9 milliards de dollars ont été investis dans le complexe solaire de Ouarzazate, dont 1 milliard de dollars de la banque d’investissement allemande KfW, 596 millions de dollars de la Banque européenne d’investissement et 400 millions de dollars de la Banque mondiale.11

L'évaluation

Le gouvernement marocain a atteint son objectif de fournir 8 % de l’énergie primaire totale à partir de sources renouvelables d’ici à 2012. Cependant, un rapport d’Ernst and Young a montré que le pays était juste en dessous de son objectif de 2020, qui est de couvrir 42 % de ses besoins en énergie primaire à partir de sources renouvelables,12 bien que le Conseil mondial de l’énergie éolienne (GWEC) affirme que le Maroc a atteint son objectif pour 2020.13 Néanmoins, les deux institutions s’accordent à dire que le Maroc pourrait atteindre son objectif de 52 % d’énergies renouvelables en 2030, en grande partie grâce au soutien politique important qu’il a reçu, aux politiques publiques ambitieuses visant à assurer la croissance des énergies renouvelables, aux fortes capacités techniques et aux conditions climatiques et géographiques avantageuses.14

En ce qui concerne la réduction du changement climatique, le plan énergétique du Maroc a contribué à faire de ce pays l’un des cinq seuls à avoir obtenu une note « suffisante » en ce qui concerne ses efforts pour maintenir le réchauffement en dessous de deux degrés Celsius dans le cadre du Climate Action Tracker. (Aucun pays n’a encore obtenu la note « modèle », ce qui fait de « suffisant » la meilleure note attribuée à ce jour).15 En outre, l’ensemble du complexe NOOR devrait, une fois achevé, réduire les émissions de carbone (CO2) de 760 000 tonnes par an,16 tandis que 800 000 tonnes d’émissions de CO2 sont évitées par le parc éolien de Tarfaya (soit l’équivalent du CO2 absorbé par près de 40 millions d’arbres par an).17

Les systèmes solaires domestiques ruraux ont permis au Maroc de réduire les inégalités spatiales et d’atteindre un taux d’électrification rurale de près de 100 %, pour une population généralement mal desservie par les services publics en raison de son éloignement. Environ 10 % de la population du pays, soit 200 000 ménages vivant dans des zones rurales isolées, ont désormais accès à des sources d’électricité durables grâce à des systèmes solaires domestiques.18

Selon l’ONEE, à la fin de 2021, la part des énergies renouvelables dans la capacité électrique du pays atteindra 37,08 %,19 dont 16,14 % pour l’hydroélectricité, 13,37 % pour l’éolien et 7,58 % pour l’énergie solaire, ce qui se traduit par une diminution de la part des combustibles de 14 % en 2008 à 7,67 % en 2021. En revanche, le charbon représente encore 37 % de la production d’électricité20 et a connu en 2022 des hausses de prix dues aux sanctions contre la Russie.

Informations complémentaires

Le Maroc est le seul pays africain à disposer d’une liaison électrique par câble avec l’Europe, et il est un acteur clé du plan solaire méditerranéen et de l’initiative industrielle Desertec. Le concept Desertec vise à construire des centrales solaires à concentration pour fournir de l’énergie renouvelable de la région MENA aux pays européens en utilisant des lignes de transmission de courant continu à haute tension (CCHT).

Références

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