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Réseau de télévision des peuples autochtones : Canada

Plateforme de diffusion autochtone pour les récits, les cultures et les langues autochtones au Canada et au-delà.

6 juin 2023
Auteur : Laura Maria Rojas Morales

Le réseau de télévision des peuples autochtones (APTN), lancé en 1999, est le premier radiodiffuseur autochtone indépendant qui propose des programmes réalisés par, pour et sur les populations autochtones et indigènes du Canada et du monde entier. Sa mission est de « partager le voyage de nos peuples, de célébrer nos cultures, d’inspirer nos enfants et d’honorer la sagesse de nos aînés ». APTN contribue à la préservation du patrimoine autochtone au Canada, qui continue d’être sous-représenté et de faire l’objet de stéréotypes dans les médias grand public. APTN est regardé par 10 millions de foyers au Canada.

Au Canada, plus de 1,67 million de personnes s’identifient comme autochtones et appartiennent aux trois principaux groupes indigènes : Les Indiens (Premières Nations), les Inuits et les Métis.1 APTN, lancé en 1999, est le premier radiodiffuseur autochtone indépendant disponible dans les langues autochtones, en anglais et en français, afin de veiller à ce que le patrimoine et la diversité des communautés autochtones soient préservés et transmis aux générations futures.2 Quatre-vingt pour cent du contenu d’APTN est produit localement et le reste provient de diffuseurs et de producteurs autochtones internationaux. Elle cherche à établir un lien avec le public en proposant des divertissements authentiques et attrayants sur de multiples plateformes et contribue à une meilleure compréhension entre les peuples autochtones et le reste du monde.3

La prolifération antérieure de programmes de télévision commerciale en anglais et en français a facilité la transmission de valeurs culturelles et sociales non autochtones, tout en renforçant les stéréotypes de pauvreté et de criminalité.4 En même temps, elle a contribué à la désintégration des traditions et des langues maternelles des communautés autochtones. En fait, plus de 70 langues autochtones parlées au Canada risquent de disparaître au cours de la prochaine génération.5 Les langues étant essentielles pour cultiver l’identité culturelle et le sentiment d’appartenance, APTN s’est engagé à préserver les langues indigènes au Canada, en plus de fournir des récits précis de la vie indigène par les peuples indigènes eux-mêmes. En 2019, les quatre chaînes d’APTN ont diffusé plus de 50 heures par semaine de programmes dans diverses langues autochtones.6

En outre, le réseau, entre autres initiatives, organise la plus grande célébration de la Journée nationale des peuples autochtones au Canada, mène sa propre enquête nationale annuelle sur les autochtones pour s’assurer que son contenu touche le public, et dispose d’une équipe de journalistes autochtones chargée de rapporter des histoires qui sont souvent ignorées dans les médias grand public.7

Mise en œuvre

APTN a pu voir le jour grâce à l’activisme des autochtones et au soutien du gouvernement. Au début des années 1970, la distribution de la télévision par satellite a commencé. Les dirigeants autochtones craignaient que les programmes grand public anglophones non autochtones n’excluent et ne menacent leurs traditions. C’est ainsi que la production télévisuelle autochtone a été lancée grâce à des programmes financés par l’État, connus sous le nom de projets Inukshuk et Naalakvik. Ces initiatives gouvernementales ont facilité la mise en place d’installations de production, fourni une formation à la production télévisuelle et permis aux communautés autochtones de bénéficier de services de radiodiffusion.8 Ces projets ont finalement abouti à la création de sociétés de radiodiffusion autochtones, telles que l’Inuit Broadcasting Corporation (IBC), qui a ensuite servi de base à l’APTN.9

Dans les années 1980, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC),10 qui a été créé en 1976 pour réglementer et superviser la radiodiffusion et les télécommunications au Canada, a formé le Comité sur l’extension du service aux communautés nordiques et éloignées (également appelé Comité Terrien) pour définir un cadre politique visant à améliorer l’accès des communautés autochtones nordiques au système de radiodiffusion canadien. Le comité, composé de représentants des gouvernements provinciaux et d’associations d’autochtones du Nord, a recommandé de donner aux peuples autochtones la possibilité de préserver leur langue et leur culture par le biais de la communication.

Entre 1983 et 1991, le gouvernement a lancé une série de politiques et de programmes visant à répondre aux besoins et aux intérêts des peuples indigènes, à promouvoir un accès équitable au système de distribution de la radiodiffusion et à garantir la consultation des représentants indigènes sur les questions de politique de radiodiffusion. Certains de ces programmes et politiques sont les suivants

  • Loi sur la radiodiffusion,
  • Politique de radiodiffusion,
  • Politique de radiodiffusion dans le Nord,
  • Programme d’accès des autochtones du Nord à la radiodiffusion (NNBAP), et
  • Politique du CRTC en matière de radiodiffusion autochtone.11

En 1987, les gouvernements des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon, ainsi que divers groupes autochtones et radiodiffuseurs, tels que la Société nationale de communication autochtone et le Service du Nord de la CBC, se sont réunis pour créer une nouvelle organisation : Television Northern Canada (TVNC). TVNC a obtenu un financement public de 10 millions de dollars canadiens (environ 7 481 000 millions de dollars américains) et a lancé des émissions avec beaucoup de succès. Par conséquent, à la fin des années 1990, les membres du conseil d’administration de TVNC ont décidé de créer un réseau national de télévision autochtone pour l’ensemble du pays et de l’inclure dans les offres de base du câble. Ils ont demandé une licence de radiodiffusion, qui a été approuvée par le CRCT en 1999, ce qui a entraîné l’évolution de TVNC en APTN.12

Coût

APTN génère des revenus grâce aux redevances d’abonnement, aux ventes de publicité et aux partenariats stratégiques. En 2022, les dépenses de l’organisation à but non lucratif se sont élevées à 46 878 969 dollars canadiens (environ 34 631 135 dollars américains).13 La création de contenu dépend largement du Fonds des médias du Canada (FMC), un partenariat public-privé fondé par le ministère du Patrimoine canadien et l’industrie canadienne du câble.

L’évaluation

APTN est devenu le premier radiodiffuseur national autochtone au monde. Les Premières nations, les Inuits et les Métis ont désigné APTN comme un exemple de réussite en matière de politique de radiodiffusion.14 Parmi les réalisations, on peut citer les suivantes :

  • Elle est disponible dans plus de 10 millions de foyers, diffuse plus de 51,5 heures par semaine de programmes en langue indigène dans 16 langues différentes et a remporté plusieurs prix du secteur et du journalisme, créant ainsi une fenêtre sur la mosaïque diversifiée de la vie des peuples indigènes.
  • APTN a été l’un des membres fondateurs du World Indigenous Television Broadcasters Network, collaborant avec les populations autochtones d’autres pays.
  • En 2015, la Commission de vérité et de réconciliation du Canada a présenté 94 appels à l’action pour faire progresser la réconciliation avec les peuples autochtones. L’une de ces actions consistait à demander à APTN de contribuer à la réconciliation en continuant à proposer des programmes qui présentent les cultures, les langues et les points de vue des peuples autochtones. En conséquence, des programmes spéciaux ont été élaborés pour commémorer les survivants, les familles et les communautés autochtones.15
  • APTN est devenu une plateforme de visibilisation et d’autonomisation des Premiers Peuples, qui ont activement et publiquement plaidé contre le racisme dans les médias et influencé les discussions sur les questions autochtones au Canada.16
  • Il s’agit d’une « plaque tournante pour les talents indigènes ».17 et renforce le rôle des créateurs autochtones en offrant des possibilités d’emploi à des centaines de professionnels, producteurs, scénaristes et réalisateurs autochtones.18 La chaîne a également noué des relations étroites et solides avec les communautés autochtones, en soutenant des cérémonies, des festivals et des forums essentiels pour les cultures autochtones.

En 2019, le CRTC a lancé un processus d’élaboration d’une nouvelle politique de radiodiffusion autochtone avec les groupes autochtones du Canada, afin de moderniser le cadre existant. Au cours du processus de consultation, les représentants autochtones ont déclaré que la nouvelle politique devait relever les défis qu’ils ont rencontrés dans le passé, tels que le financement limité, la nécessité de nouveaux indicateurs pour mesurer le succès de la politique (non basés sur des normes coloniales) et l’expansion de la programmation autochtone à d’autres réseaux qu’APTN.19

Le réseau s’est penché sur le manque de représentation et de reconnaissance des voix indigènes dans les médias grand public. Elle a gagné en influence politique en sensibilisant aux questions autochtones et en jouant un rôle important dans la responsabilisation des gouvernements, en demandant que les fonctionnaires prennent en compte les questions liées aux besoins et aux droits des autochtones, qu’ils y répondent et qu’ils en soient tenus pour responsables.20 Bien qu’elle ait également été confrontée à des critiques et à une résistance, certains téléspectateurs n’étant pas à l’aise avec la représentation de certains aspects de leur culture, APTN est devenue une plate-forme puissante pour les centaines de communautés autochtones séparées par la distance et l’identité et largement ignorées par les médias grand public, mais unies dans leur demande d’une plus grande reconnaissance au sein de la société canadienne.21

Références

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